Geffroy de Lestrange (Cornerstone, EMEA Product Marketing Manager) : Le principal obstacle est sans doute dans la volonté d’évaluer ! On se contente d’un questionnaire post-séminaire pour le présentiel – qui reste toujours utile en cas de problème. Cela dit, d’expérience, les remarques concernent souvent la qualité du repas plus que celle du contenu de la formation ! Et ce processus correspondant au 1er niveau Kirkpatrick n’est pas systématiquement proposé pour les formations digitales. Quand la formation concerne un sujet obligatoire (conformité, sécurité, hygiène…), un test ou une validation permettent souvent de s'assurer au moins que les connaissances sont acquises. Au-delà des formations obligatoires, l’important est l’impact business de la formation, qui nécessite une vraie négociation des objectifs attendus de la formation entre le responsable formation et le manager de proximité ; ces objectifs s'expriment en termes de connaissances et de compétences à acquérir, et prendront en compte les tâches à accomplir au quotidien et les buts assignés. Bien évidemment, il faut aussi vérifier objectivement ce point en aval !

Jonathan Pottiez (Formaeva, Consultant Senior) : Le « quoi » et le « comment » évaluer posent toujours question aux responsables formation. Pour surmonter ces obstacles, ils auraient donc tout intérêt à se former pour acquérir les compétences adéquates et travailler à l’évaluation d’une première action de formation stratégique, jusqu’au retour sur les attentes (ROE). Cela permettra d’enclencher le changement et de montrer à leur direction générale que le sujet est pris au sérieux. Le plus tôt sera le mieux, car l’évaluation n’est pas tant un défi technique que culturel et organisationnel : celui de montrer que la formation est un levier de performance qui requiert l’implication de tous. Cette première expérience passée, il sera possible de bâtir une véritable politique d’évaluation, indiquant quelles formations évaluées et à quels niveaux. Évidemment, une plateforme logicielle performante leur permettra d’industrialiser l’évaluation d’une partie importante des formations, tout en traitant au cas par cas les formations stratégiques évaluées jusqu’au ROE.

Laurent Balagué (Formetris, Président) : Il existe deux extrêmes à éviter : chercher à appliquer le même processus d’évaluation à toutes les formations, et inversement considérer chaque formation comme un cas particulier nécessitant un processus ad hoc. Dans le premier cas, la stratégie d’évaluation manque de flexibilité : il s’agit plus d’une procédure standard que d’une véritable stratégie, ce qui donne lieu parfois à des résultats d’évaluations peu opérationnels. Dans le second cas, l’énergie à déployer devient trop grande, au point de donner lieu soit à des découragements, soit à des « usines à gaz ». Se doter d’un outil d’évaluation dont le fonctionnement par défaut soit simple et couvre la majorité des cas, mais qui soit suffisamment flexible pour intégrer les particularités de certains programmes et parcours de formation. Désigner une personne référente de l’évaluation est aussi un gage de succès pour définir et faire vivre la stratégie d’évaluation.

Mathieu Heidsieck (Xperteam, Directeur commercial et marketing) : Il y a encore une grande sous-estimation du potentiel de l’évaluation pour mobiliser et progresser dans notre pays. Cependant, le sujet monte tout de même en température. Tout à chacun s’habitue à évaluer les services de la nouvelle économie et des outils naissent tous  les jours ce qui est significatif d’un changement en cours. L’émergence des logiques d’ancrage mémoriel peut aussi contribuer à donner une autre image de l’évaluation. L’arrivée de technologies d’évaluation de l’expérientiel va aussi sérieusement bousculer les habitudes. La visibilité de plateformes d’évaluation globale et unifiées est-elle suffisante ? Une qualification précise des besoins et objectifs de la formation en amont, une étude approfondie des différents niveaux du nouveau modèle de Kirkpatrick, ainsi qu'une mise en pratique directe s’appuyant sur des outils adaptés actuellement disponibles sur le marché permettront de construire et d'optimiser une véritable stratégie d'évaluation des connaissances, des compétences et de la formation, nécessaire à la bonne performance de l’entreprise.

Jean-Michel Demarly (Kacyonet, Directeur général) : La mise en place d’une stratégie d’évaluation de la formation soutient l’action des décideurs souhaitant valoriser l’impact positif de l’investissement-formation. Si les organisations peinent à atteindre cet objectif c’est parce que la définition de la stratégie d’évaluation manque souvent de pertinence, que l’impact recherché n’est pas clairement établi et que l’existence d’outils de mesure et d’analyse appropriés fait défaut. La stratégie la plus efficace est donc celle qui permet d’appréhender tout à la fois les dimensions organisationnelle, pédagogique et technique de l’évaluation pour choisir celle qui sera la mieux adaptée au but recherché. Ainsi, on ne saurait que conseiller aux entreprises de prendre le temps d’étudier le contexte dans lequel doit s’appliquer l’évaluation, d’analyser les caractéristiques des différents publics-cibles, d’anticiper la portée que le dispositif aura sur ces populations et de définir les modalités de réalisation et de suivi que sous-tend sa mise en œuvre.